Le designer et créateur de mode japonais Issey Miyake s’est éteint à l’âge de 84 ans. Après plus d’un demi-siècle dans le monde la mode, le créateur laisse derrière lui un héritage sans pareil.
On apprenait le 9 août dernier le décès du grand Issey Miyake des suites d’un cancer. Le designer laisse une empreinte indélébile sur le monde de la mode et fait parti aux côtés de Rei Kawakubo et Yohji Yamamoto des designers japonais des années 60-70 apportant un vent de renouveau dans la haute couture parisienne.
Optimisme et détermination
Issey Miyake voit le jour en avril 38 à Hiroshima. À peine âgé de 7 ans, il assistera au largage de la première bombe atomique par les troupes américaines sur sa ville natale, trois jours avant qu’une seconde bombe touche Nagasaki. Bombe qui causera plus de 140 000 morts et ne sera pas sans conséquence pour Issey Miyake et sa famille. En effet, la mère du designer décédera trois ans plus tard des suites des radiations causées par l’explosion. À l’âge de 10 ans Issey Miyake se verra diagnostiquer une maladie osseuse qui l’handicapera au niveau de sa démarche. Une jeunesse alors compliquée, mais qu’il ne l’empêchera pas de vivre et de poursuivre ses rêves.
Issey Miyake se verra diplômé des beaux-arts Tama à Tokyo puis décidera de s’installer à Paris, capitale de la mode en 1965. Il y étudiera d’abord à la chambre syndicale où il croisera la route d’un autre designer japonais en herbe Kenzō Takada. Dès 1966, Issey Miyake s’imposera dans la capitale après avoir travaillé comme assistant pour Givenchy ou Guy Laroche. Des premiers pas alors réussis, cependant les manifestations de mai 68 changeront sa perception du vêtement. Alors plutôt que de fabriquer de vêtements pour les privilégiés, il choisit d’élargir son horizon et de proposer des vêtements adaptés à tous.
Ce changement de vision le poussera à ouvrir un atelier à Tokyo ainsi que des boutiques entre les capitales nippones et françaises. Ce qui l’amènera à présenter sa première collection en 1971.
Innovations et matériaux inédits
Depuis le début de sa carrière, Issey Miyake se désigne plus comme un fabricant de vêtements que comme un styliste. Tout d’abord, on ressent cette idée dès ses premières collections. Le japonais allie inspiration asiatique et occidentale mais aussi mode et nouvelle technologie. Afin de l’assister dans sa quête d’innovation, le designer japonais s’entoure de chercheurs en textile et d’ingénieurs modélistes et crée un département centré sur la recherche et le développement.
Dès les années 80, Issey Miyake fait rayonner sa vision et son style singulier. Le designer propose des pièces confortables en reprenant une technique traditionnelle japonaise : l’origami. En résultent des pièces au volume reconnaissable. Parmi les nombreux autres matériaux utilisés par le créateur, on retrouve notamment le fil de fer, le plastique, le crin mais aussi du papier artisanal japonais. Certaines pièces de ses collections étaient souvent confectionnées en une seule pièce de tissu. Enfin, Issey Miyake est surtout connu pour sa technique du plissé, reconnaissable entre mille et faisant encore aujourd’hui la renommée du créateur.
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Lancé en 88, le concept de « Pleats Please » s’inspire de ce fameux plissé. D’abord une collection puis une marque à part entière, « Pleats Please » se compose de vêtement en soi extrêmement léger fabriqué à partir d’une technique unique de plissé. Les matériaux sont développés à partir d’un seul fil et où les plis sont ajoutés après avoir obtenu la forme du vêtement. L’occasion pour le créateur de laisser parler sa créativité, notamment à travers la série « Artist Series » où les robes se voient ornées d’oeuvre d’art et de portrait.
Le minimalisme à son état le plus pur
Le minimalisme et l’art d’Issey Miyake résonneront chez de nombreuses personnes y compris chez certaines personnalités. Steve Jobs alors en voyage à Tokyo afin de visiter les bureaux de sony remarquera la tenue des employés. Alors à la recherche d’un uniforme pour les employés de chez Apple, il contactera Issey Miyake à l’origine des vêtements de chez Sony. Au fur et à mesure de la conception de cet uniforme, Steve Jobs et Issey Miyake se lient d’amitié. Bien que l’équipe californienne de chez Apple ne portera jamais les uniformes du japonais, Steve Jobs lui demande une tenue reconnaissable qu’il pourrait porter lors de ses keynotes.
En résulte le fameux pull noir à col haut que le génie de la tech portera jusqu’à sa mort. Avec ce simple pull, Issey Miyake signe l’une de ses pièces les plus connues à son image minimaliste et confortable. La production s’arrêtera à la mort du créateur d’Apple en 2012. Bien que vers la fin de sa carrière, Issey Miyake se voit plus connu pour ses parfums et ses sacs, ses créations textiles restent elles, intemporelles.
« Architecte de la pureté, un homme ouvert au monde et humble, dont l’oeuvre immense, millénaire et futuriste surprend, étonne, émeut. Elle est à la fois sculpture et mouvement ». Jack Lang au sujet d’Issey Miyake
Issey Miyake prendra sa retraite en 97 et laissera les rênes de son atelier et de son art entre les mains de son assistant Naoki Takizawa. Plus tard en 2007, Dai Fujiwara renouvellera l’image de la marque tout en gardant son identité d’origine. En 2016, Issey Miyake présentera plus de 45 ans de travail et de recherche par le biais de l’exposition « The work of Issey Miyake » à Tokyo. Le designer laissera une emprunte sans égale et continuera d’inspirer une flambé de jeunes créateurs à travers ses innovations et sa singularité.
L’hommage du Sho Shibuya à Issey Miyake 🖤
L’artiste a dressé un rideau noir sur la couverture d’un exemplaire du New York Times en date du 9 août 2022, jour du décès de Miyake. Une belle façon de partager son dernier adieu pour le créateur japonais. pic.twitter.com/R1BMxT370s
— TrenteTroisDegrés (@33Degres) August 10, 2022