Récemment, c’est à l’occasion de la Paris Fashion week que le créateur a encore frappé. Comme à son habitude, sa nouvelle collection faisait l’objet d’une présentation atypique prenant forme d’un show TV.
Seulement, d’où provient KidSuper ? D’où émergent les prémisses de ce collectif à l’ambition intrépide ?
“Only those who want to be forgotten, give up”
Après s’être emparé du prestigieux prix LVMH en 2021, Colm a persisté sur sa lancée en dévoilant sa nouvelle collection à l’état d’âme pleinement émérite. Pour se faire il a réalisé un court métrage rappelant l’esthétique des années 90 et leur show télévisé. Prénommé The Misadventures of KidSuper, le film rassemble plusieurs personnalités new-yorkaises dont Princess Nokia, Joey Bada$$ ainsi que Marc Jacobs.
Les pièces revêtent un tas de couleurs au ton fantaisiste qui rappellent le pop art typique à Warhol. Le tout est attrayant. Velours côtelé, patchwork, motif damier… Aucun doute, on se trouve en plein New York City dans la tête de Colm Dillane. Ce dernier tisse des vêtements qui reflètent le propre de son talent artistique. Portrait, esquisse, croquis, habillent ses textiles dont en ressort de véritables oeuvres d’art. En témoigne subtilement la “Kissing Puffer”.
The Misadventures of KidSuper retrace les débuts du collectif. Divers événements sont mis en scène, dont la surprenante histoire de leur devise : “Seuls ceux qui veulent être oubliés, abandonnent”. KidSuper n’est pas un label comme un autre. L’originalité ne manque pas. La trivialité, elle, est à bas.
Colm Dillane : les mains d’un artiste, la pensée d’un designer
KidSuper a été fondé par Colm Dillane il y a presque une dizaine d’années. Il s’agit d’un collectif qui regroupe divers artistes sur quasiment tous les plans. KidSuper c’est à la fois une marque de vêtements, un studio de musique, une galerie d’art, du montage vidéo… En bref, il s’agit de l’entrepôt de la créativité new-yorkaise à l’état pur.
Colm Dillane a probablement davantage la tête dans les nuages que les pieds sur terre. Pour autant il est certain que le succès qu’il connaît à l’heure actuelle, est loin d’être tombé du ciel. En conséquence de quoi le créateur a su faire preuve de patience en prouvant au fil des années de quoi il était capable à travers ses projets, voire préfère-t-il, ses rêves d’enfants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il déclare :
« Je pense qu’à notre époque, le directeur créatif doit constamment évoluer, s’élever et devenir de plus en plus un génie pour que cette marque réussisse. Prenez Virgil Abloh comme exemple parfait. Il a constamment évolué et élevé son art et affiné son génie, ce qui a entraîné l’explosion de popularité d’Off-White™ et l’appel révolutionnaire de Louis Vuitton”.
Colm revient de loin, alors commençons par le commencement. Né à NYC, il grandit un temps au Mexique puis dans le Wisconsin. Son train de vie tourne autour de l’école, du foot ainsi que l’art dont la prééminence s’impose. De retour à NYC, il est submergé par l’emprise de la mode qui pèse sur la Big Apple. Une emprise à laquelle il n’était pas auparavant habitué, car inexistante dans la petite école qu’il fréquentait.
L’accessibilité des grandes marques et le matérialisme qu’elles impulsent lui semblent absurde. Dès lors, Colm se détache des codes qui dictent la société et prétendent ce qui est cool ou non. Le jeune artiste va prématurément remettre en cause ce système et c’est à partir de là qu’il trouve sa voie. L’histoire de KidSuper est en marche.
Il débute alors en vendant des t-shirts dans son lycée sous le nom de BOTS. Arrivé à l’université, son activité persiste mais elle ne fait pas long feu. Malheureusement il sera viré de sa chambre étudiante pour l’avoir complètement transformée en boutique.
À ce moment-là, Colm voit les choses en grand. Lui et ses amis s’installent dans un local dans lequel ils pourront à la fois vivre et travailler. Situé à Brooklyn, le magasin prend avec le temps davantage de forme et la notoriété de KidSuper se concrétise en parallèle avec les projets du label.
“D’où vient KidSuper, c’est absolument fou. Je vendais des t-shirts dans la cafétéria d’un lycée, puis sur une planche à repasser dans la rue à Soho, puis j’ai transformé ma chambre d’étudiant en magasin, puis j’ai emménagé dans une devanture de magasin avec tous mes amis, puis j’ai b**** la Fashion week parisienne”.
Colm Dillane : un novateur effréné
La créativité de Colm Dillane coule de source. Elle se retrouve notamment dans ses défilés à travers lesquels il s’est efforcé d’innover. À l’époque, la Paris fashion week lui avait refusé à deux reprises une participation officielle à l’événement. De son côté, Colm était passé outre ce formalisme pré-établi en organisant tout de même deux shows : « A Bull In China Shop » pour SS20 (où les parents du créateur ont d’ailleurs défilé) et « Running As Fast As You Can » pour l’automne hiver 2020.
“J’ai ouvert mes deux premiers défilés de mode parisiens non officiels avec la lettre de refus du calendrier officiel imprimée sur une tenue parce que pour moi, c’était le but de la marque, il n’a jamais été question d’être accepté, c’est le voyage et les objectifs irréalistes !”.
Lorsque Colm bâtit quelque chose, il s’assure d’être le premier à faire ce qu’il entreprend. Et c’est justement en tant que promoteur de son propre courant qu’il avait en 2021 présentait un défilé de Barbie en stop motion, intitulé « Everything’s Fake Until It’s Real ».
Les poupées miniatures du show représentaient de fait des célébrités cultes telles que Salvador Dali, Bernie Sanders, JLo, Stephen Hawking… La chanteuse Lolo Zouaï y interprétait à l’occasion le morceau “Beaucoup”. Ce fut l’un de ses projets les plus durs à réaliser mais grâce à qui, il a finalement pu se hisser sur le calendrier officiel de la PFW et gagner une nomination LVMH.
Pour citer un autre de ses défilés, prenons celui à l’occasion de la Fashion week de NYC en mode thrift shop. Cette fois-ci, le show comptait que des vêtements donnés puis recyclés par le KidSuper Studio. Quoiqu’il en soit, Colm n’est jamais à court d’idées, en atteste la fois où il a demandé à plus de 300 personnes ce qu’elles voudraient faire avant de mourir et afin de les aider à réaliser cette chose…
Collaboration sur collaboration, le reflet d’une notoriété grandissante
Kid Super accumule les grands noms dans son répertoire. Des célébrités comme Young Thug, Bad Bunny, J. Cole, Angus Cloud ou encore Dua Lipa portent des pièces du streetwear new-yorkais. Et puis il compte également d’innombrables collaborations : tantôt pour la cover d’un album de Russ, tantôt pour une vidéo avec Steve Aoki, Soulja Boy ou encore Asap TyY.
Par ailleurs, des marques bien connues du grand public ont à leur tour sollicité le new-yorkais :
- Puma x KidSuper Studios (2020) : la collaboration regroupe en partie Westside Gunn, Usain Bolt, Lil Tecca… dans le dessin animé SCRAM!
Parmi toutes ces collaborations, la plus grande fierté de KidSuper, et cela se comprend, est la suivante. Mac Miller fut le premier à porter la marque. Une anecdote inoubliable pour le créateur qui raconte : « je m’étais lié d’amitié avec SweetJames (le meilleur ami de Mac) sur Facebook et lui avais envoyé une photo d’une chemise tie-dye que j’avais faite. J’ai dit que je pense que toi et le gang aimeriez ça. Il a répondu envoyer un paquet, j’ai dit que s’il est jamais à New York, je peux lui apporter des vêtements, je voulais le rencontrer en personne. Il a dit qu’il était à New York et m’a envoyé un message où venir. 4 heures plus tard, j’étais sur le plateau de tournage de Mac Miller […]. » À la sortie de Blue Slide Park, la page d’accueil iTunes y présentait justement le rappeur avec une casquette KidSuper.
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KidSuper : “a real company built on unreal ideas”
Peut-être que jusqu’ici vous ignorez qui était Colm Dillane, son label et son parcours à la trajectoire si singulière. Peu importe, gardez à l’esprit que KidSuper est tout simplement le reflet accentué de la personnalité de Colm.
Le collectif s’appréhende par les rêves et espoirs que tout enfant garde en lui. Des rêves que rien ni personne peut défier. C’est précisément cette magie que retranscrit la philosophie de KidSuper. Osez croire en l’émerveillement de l’enfant que vous étiez.
Par-dessus tout, la vision artistique de Colm est particulièrement bien exécutée. Elle dégage autant d’admiration que d’inspiration. Colm rase l’ennui, le remplace par la récréation et s’affranchit de toute forme de conformisme. Il s’assoit sur la façade protocolaire des grandes maisons privilégiant son imagination. Colm fait primer la culture sur le luxe, la créativité sur un business préfabriqué.
Situé 354 rue Broadway à Brooklyn, KidSuper Studios n’est plus l’atelier du coin. Bienvenue dans la fabrique du “tout est possible”.