Décédé le 9 avril dernier, revenons ensemble sur l’incroyable série de Dark Man X a.k.a DMX et la trace indélébile qu’il laisse.
Les premières années de vies de DMX sont malheureusement celles de trop de jeunes afro-américains. Il voit le jour à Baltimore, bien qu’il existe une incertitude sur son lieu de naissance. L’arrivée au monde de Earl Simmons se fait au sein d’un foyer brisé. Sa mère Arnett, est âgée de seulement 19 ans. Son père, un certain Joe Baker restera absent de la vie de son fils.
Son enfance et son adolescence sont jalonnées par la souffrance et les abus. À 14 ans, il touche au crack, sans le savoir après avoir fumé un joint de cannabis mélangé à la substance. S’en suivra des déboires avec la drogue qui le suivront tout au long de son existence. Il découvre la vie dans les rues de Yonkers (banlieue de New-York), à tout juste 14 ans pour fuir sa mère et ses coups, répétés, qui laisseront des séquelles physiques et psychologiques. En manque de repères, ces séquelles feront du jeune Simmons un écorché vif, avec une estime de lui-même grandement touchée.
Il connaîtra la nécessité de survivre, qui le poussera aux petits délits. Ceux-ci allant de vol de sac à l’arraché jusqu’au vol de voiture. Celui qui n’est pas encore DMX découvre le rap grâce à des rencontres faites lors de son placement en foyer. Un évènement déterminant qui changera l’épopée incroyable du jeune Simmons. Finalement rattrapé par ses multiples excès et son train de vie marqué par l’illégalité, il passe par la case prison.
Icône : mode d’emploi
C’est en 1992 qu’il signe chez Ruffhouse Records, affilié au label Columbia. Cela lui permettra de sortir deux singles, Born Loser puis Make a Move. Après un début entaché par la précarité et la prison, le jeune Earl semble apercevoir la lumière au bout du tunnel. Cette lumière lui vaudra de figurer sur le titre Time To Build au côté de Jay-Z, Ja Rule sur le morceau du rappeur du Queens, Mic Geronimo. Les deux premiers formeront avec DMX le groupe Murder Inc. qui n’aura pas l’occasion de prospérer, en raison de beef entre DMX et Jay-Z puis entre DMX et Ja Rule.
C’est finalement avec l’écurie Def Jam (label fondé en 1984 par Russell Simmons et Rick Rubin) qu’il se hissera sur les cimes de la scène rap US. It’s Dark and Hell Is Not, son premier album d’envergure sort le 12 mai 1998. Sans aucun doute un classique du genre.
Propulsé par des titres comme Ruff Ryders Anthem ou encore For My Dogs, l’album finira premier des charts. On retrouve le jeune producteur Swizz Beats, qui connaîtra lui aussi, par la suite, une renommée retentissante. L’énergie et le caractère brut de ce disque lui permettront d’avoir l’intention de tous. Une consécration pour le jeune Simmons. Damien, 9ème titre de l’album, est un titre où plusieurs voix se mêlent. Celle du rappeur, mais aussi celle de Damien qui est en réalité un démon qui promet à DMX la fortune et le succès (thème repris par nombre de rappeurs de Snoop Dogg sur le titre Murder Was The Case ou encore Kendrick Lamar dans For Sale?(Interlude).
« Where’s my guardian angel? Need one, Wish I had one » (Où est mon ange gardien ?, j’en ai besoin, j’aurais aimé en avoir un)
Ceux à quoi une voix nasilarde répond :
« I’m right here, shorty, and I’ma hold you down » (Je suis là mon petit, je suis serai là pour toi).
Ce morceau, qui met en scène ce pacte faustien, permet de comprendre que le rappeur est désormais en route vers la gloire. Avec la mort des figures que sont Tupac et Notorious Big, il reprend tout naturellement le flambeau du hardcore hip-hop US.
En pleine ascension, DMX refuse ce hiatus qui vient souvent entre deux albums, notamment entre le premier et le second, qui est un moment charnière dans la carrière d’un artiste. Un peu plus tard cette année, DMX livre finalement Flesh Of My Flesh, Blood Of My Blood. Un second album studio, dont la cover révèle le rappeur couvert de sang. Ce dernier reprend les ingrédients de son premier album pour asseoir sa dominance avec confiance. Jay-Z, Marylin Manson, Jadakiss ou encore Mary J Blidge se joindront à la liste des guest de renom.
L’album débutera aussi en tant que numéro 1. Ce qui fait de lui le second rappeur US de l’histoire à faire débuter 2 albums à la premier place, et cela en une année. Et cela derrière Tupac, malgré le fait que son album The Don Killuminati soit sorti sous l’alias Makaveli.
DMX au festival de Woodstock ça donnait ça : près de 200.000 personnes qui chantaient « Ruff Ryder’s Anthem » 🔊 pic.twitter.com/J4H2UnrlDJ
— TrenteTroisDegrés (@33Degres) April 9, 2021
Back-to-back
Sa série ne s’arrêtera pas là, en effet en décembre 1999, soit un an après la sortie de son deuxième album, DMX est une fois de plus de retour avec son troisième opus …And Then There Was X. En pleine bourre, il ajoute une nouvelle pierre à l’édifice de sa discographie avec ce projet. On y retrouve un morceau iconique produit par Swizz Beatz (que l’on retrouve à la production lors des deux précédents disque) : Paty Up (Up In Here) que l’on reconnaît avec ce sifflet omniprésent dans le morceau. Cette tentative se soldera là aussi par un numéro 1 en première semaine. Soit quatre numéro 1 de suite.
Mais la légende de DMX ne serait pas ce qu’elle est si son cinquième album Grand Champ, sorti en septembre 2003, ne s’était pas lui aussi classé numéro 1 en première semaine. Ce qui fait de lui le seul artiste à avoir fait monter 5 albums sur le sommet des charts en sept jours ! 2 autres albums viendront figurer dans sa discographie, Year Of The Dog, sorti en 2006 (qui terminera lui numéro 2) puis Undisputed, son dernier projet, sorti en 2012.
Toutefois, au début des années 2010, DMX entre dans la quarantaine et ses belles années semblent derrière lui. Son prime bien loin, le rappeur reste néanmoins un nom connu et respecté. En 2013, ce dernier annonçait la venue d’un huitième album, qui le verrait réuni avec son producteur fétiche, Swizz Beats. Cependant, la scène a bien changé et l’hégémonie de la trap n’est qu’une question de temps. 2019 a des allures de come-back puisqu’il signe un deal important avec le label Def Jam, son ancien label. Il sera malgré ça, rattrapé par ses démons.
La culture hip hop doit beaucoup à DMX, un de ses enfants chéris, brisé par la vie et en état de grâce par sa musique. Il se battra toute sa vie contre ses diverses addictions. Il entrera en « rehab » plusieurs fois entre les années 2000 et 2021, année où il nous quitta. C’est finalement cette pente glissante qui aura eu raison de lui. Il brille désormais parmi les légendes du Rap avec un grand R.