Suite à l’excellent Barnacles sorti en 2020, le rappeur d’Atlanta nous présente cette année son tout premier album studio. Un album qui se colle, non pas à la grande imagination de Sah, mais qui se confronte à la mort de son cher ami, Demon Child.
Le deuil de SahBabii, son album en guise de thérapie
Connu pour son esprit siphonné et ses métaphores décalées, SahBabii, de son vrai nom Saaheem Malik Valdery, nous propose avec « Do It For Demon » un album révélant une facette de lui-même alors inconnue jusqu’ici.
À priori, les mélodies peuvent paraître entraînantes, voire gaies, mais ce serait une erreur que de penser qu’il en va de même pour les paroles. Celles-ci méritent de s’y attarder car le rappeur rend en réalité hommage à son défunt ami.
C’est en déménageant à Atlanta que SahBabii rencontre Demon en jouant au basket, ce dernier étant lui aussi nouveau dans la ville. Les deux vivent sous le même toit et grandissent ensemble. Ils se considèrent comme de vrais cousins appelant chacun la mère de l’autre “tante”. Leur amitié entre eux devient une véritable relation fraternelle.
Le perdre entraîne donc une peine immense et inéluctable pour SahBabii. Forcément, l’album ne s’entend plus de la même manière. Si on se limite à une simple écoute, l’existence de cette sombre thématique s’efface dans les prods chill et grâce à la voix planante de Sah.
Toutefois le deuil est pourtant profond : tristesse, dépression et vengeance établissent le fil conducteur du projet. L’album débute avec “Divine Order” entièrement consacré à Demon. Sah précise d’ailleurs dans une interview :
« C’est ma chanson préférée du projet parce que je sais qu’en l’enregistrant, je ressentais beaucoup d’émotions. J’ai dû m’éloigner du micro plusieurs fois pour verser quelques larmes ».
Sa douleur se fait aussi ressentir dans “Bad Thoughts Mixed with Weed”. La perte de Demon l’affecte tellement que sa douleur se transforme en soif de vengeance, un sentiment exprimé à travers “Today Might Be The Day” et “Scared of Myself”. Il en vient même dans “Bread Head” à vouloir engager un tueur à gage.
Par ailleurs, sur le morceau “Do it for Demon”, il insiste sur la violence des gangs , violence dans laquelle il a grandi. En soit, la criminalité de rue est un thème récurrent chez les rappeurs US. Mais disons qu’avec SahBabii c’est différent, son album est loin d’apparaître comme celui de trop sur le sujet. En effet, la perte de son proche l’a entraîné hors des sentiers battus au niveau de ses lyrics. Dévoiler ses sentiments sur un évènement aussi tragique participe à l’évolution du rappeur proposant un album plus réfléchi, soigné et moins “bête” qu’à ses débuts.
Rupture ou continuité ?
Do It For Demon n’est pas en totale rupture avec ses anciens projets. SahBabii se caractérise également par ses addictions sexuelles et sa passion pour les animés. Ici, il casse parfois l’esprit malheureux de l’album en rapportant son extravagance sur certains sons tels que « Boofalay »,“Dickalationship” ou encore “Jody Kurosaki”.
En définitive, DIFD est à la fois un hommage mais également un album personnel que l’on peut voir comme un livre ouvert sur la vie de SahBabii.
On vous invite fortement à écouter « Do It for Demon« de Sahbabii si ce n’est pas déjà fait. Les vingt sons s’enchaînent bien et sa musique reste fidèle à son style de rap complètement unique. Notez que la majorité de l’album a été produit par T3, son frère, avec qui il a toujours travaillé.