Au sein de cette nouvelle ère du rap français, la créativité de chacun n’a plus aucune limite. Entre sensibilité et amour, Lovelynils se livre aujourd’hui à nous au travers d’une interview sur son approche autant personnelle que singulière de la musique.
En amont de la sortie de son nouveau projet « DMT », Lovelynils nous a accordé une interview passionnante dans laquelle il revient sur ses débuts de carrière et ose se projeter vers un avenir prometteur.
Pour commencer est-ce que tu pourrais te présenter en quelques mots, pour ceux qui ne te connaîtraient pas encore ?
Je m’appelle Lovelynils et je viens du sud de la France. Je fais du son depuis 2017 mais j’ai commencé à les sortir super tard, vers fin 2021. Avant c’était sur Soundcloud mais en privé, c’était vraiment pour mes potes et moi. C’était juste pour le plaisir et je n’avais aucune prétention sur le son, c’était uniquement quelque-chose qui faisait du bien.
Quel a été l’élément déclencheur de ton début de carrière ?
C’est vraiment par les rencontres. Je bossais avec Rozzy et il enregistrait son album chez moi. Un jour il a entendu un son que j’ai fait et il m’a directement proposé de faire un featuring. C’était Pop X dans Fort de Sens. À la base ça devait juste être un son comme ça, mais par la suite il a proposé qu’on fasse ce projet, que nos labels co-produisent.
Ensuite ça s’est enchaîné, Octave (Pourlamourdoctave) a entendu le son avec Rozzy et m’a proposé d’en faire un avec lui, il s’est passé la même chose avec thaHomey et ainsi de suite… Du coup plus les gens me proposaient de faire des sons, plus je me suis dit que j’allais m’y mettre plus sérieusement. C’est un truc qui me procure énormément de plaisir ! Toutes les meilleures émotions de ma vie, je les retrouve en faisant de la musique.
Désormais, est-ce que tu gères cette partie marketing ?
Moi je gère tout avec Alex, mon ingénieur son. On a aussi notre label qui s’appelle Silence Wireless. On est pas encore au stade de recruter des personnes qui gèreraient uniquement le marketing. Même si on se prend un peu plus la tête, on est pas non plus dépassés et ça se passe plutôt bien !
Pourquoi « Lovelynils » ? Quelle est la signification ?
Je suis un vrai « lovelyboy » dans tous les cas, donc le préfixe « Lovely » c’est clairement par rapport à mon tempérament et à ma façon d’être. Je suis assez timide, serviable et gentil donc j’ai ce côté là, très romantique. Je ne suis pas du tout un mauvais garçon. En revanche « Nils » c’est pas du tout mon nom. C’était le nom de mon chien Nelson que j’appelais Nils. Il est malheureusement décédé et j’avais envie de lui rendre hommage.
Comment définirais-tu ta musique et ton style ?
Ma musique est très colorée. Je pense que c’est parce-que je viens du sud. J’ai toujours eu une musique plus ou moins festive. Et surtout très lumineuse. Je suis pas très « dark », j’ai beaucoup de mal à poser sur ce genre de choses. En vérité, c’est clairement des chansons de « lover », c’est très tourné autour des relations humaines et amoureuses ! C’est ce qui m’apporte le plus d’émotions et je fonctionne énormément en fonction d’elles.
Autrement, je suis quand même très ouvert et j’ai pas de style musical en particulier. Je ne suis pas représentant d’un mouvement musical, moi je navigue !
Quelles sont tes inspirations ?
J’ai eu beaucoup d’inspirations tout au long de ma vie. Quand j’étais petit j’écoutais pas mal de Tupac. J’écoutais aussi du rock quand j’étais au lycée, puis ensuite je suis parti dans l’électro… J’ai vraiment navigué. Mais aujourd’hui, il y a trois personnes qui se démarquent considérablement dans ma tête.
La première personne c’est Bladee, quand je l’ai découvert, ça a totalement changé ma perception de la musique. Depuis 2014 il sort de la musique très « perchée », et vraiment de niche. Il fait ce qu’on appelle de la « drain », avec beaucoup d’auto tune et de mélodies. A$AP Rocky m’a aussi beaucoup marqué, mais il en a inspiré beaucoup d’autres je pense.
Pour finir je vais citer une personne de la wave française actuelle. Celui qui m’a le plus inspiré, c’est BIG B. Lorsque je l’ai rencontré par la suite et que j’ai pu travailler avec lui, j’ai vu à quel point il était vrai et à quel point il en avait rien à faire du « clout ». Il fait sa musique parce-que ça lui parle et c’est tout. Il m’a fait découvrir le DMV flow et toute cette vague. Pour moi c’est vraiment le G.O.A.T., et il n’est pas reconnu à sa juste valeur. BIG B c’est une « underground legend ».
Est-ce que tu peux nous parler de ton label Silence Wireless et pourquoi tu as fait le choix de le créer ?
À la base c’est quelque chose que j’ai crée fin 2016 après le lycée avec Gabora un ami producteur de musique. C’était vraiment pour produire des artistes, parce-qu’avant je ne faisais pas de son, je manageais juste quelques artistes de chez nous. Donc depuis que je suis au lycée, c’est vrai que j’ai toujours baigné dans la musique.
J’ai fait des clips, j’étais manageur, j’organisais des soirées hip-hop au nom du label. J’ai accumulé les compétences on va dire. C’était quand même un longue partie de galère avant qu’on se décide à se concentrer sur nous.
En mars tu as décidé de lancer ta carrière en solo, avec « Who’s Lovely ?« . Pourquoi ce nom, et quel a été le déclic pour ce premier projet ?
Quand Fort De Sens est sorti, il y a eu un peu d’effervescence autour de mon nom. Pas une effervescence énorme, mais c’était assez pour que je me dise que je devrais essayer de faire quelque-chose ! Tout le monde m’a poussé à faire un projet solo. Pour le nom du projet, c’est marrant. À la base, le média « PÉPITEfr » avait annoncé Fort De Sens et ils avaient énoncé les noms de la tracklist. Mais moi je n’existais pas encore, du moins pas publiquement.
Alors il y a un mec qui a répondu : « Lovely inconnu ou c’est moi ? ». Ce qui était vrai parce-que personne ne me connaissait. Ensuite thaHomey m’a proposé de l’appeler Who’s Lovely ?, parce-qu’en réalité on ne savait pas qui j’étais ! C’était ça le truc plutôt drôle et logique. On a fait ce projet là en une semaine. Ça a été assez rapide.
Tu es très entouré sur Lovely Boyz et sa réédition. Tu veux continuer ainsi ou comptes tu faire des projets avec moins d’invités ?
Personnellement, j’aime énormément collaborer. Je ne suis pas compositeur. Alors dès que je fais un morceau, pour moi c’est déjà une collaboration. J’aime beaucoup quand il y a un échange et je suis beaucoup dans le partage. On va dire que je suis un loup, je vis en équipe, je ne suis pas du tout un mec solitaire !
Forcément il y a aussi une partie de moi qui aime beaucoup faire des sons tout seul, mais j’aime bien le mélange des deux. Pour Lovely Boyz, le thème était très lumineux et je cherchais vraiment un coté « famille ». Grâce à tout le monde, j’ai réussi à avoir une très grande palette sur ce projet, puisque chaque personne a amené quelque-chose de particulier.
Beaucoup de fans m’ont aussi dit qu’ils aimeraient bien des sons en solo. Ça me dérange pas c’est quelque chose que j’aime bien, je peux aller plus en profondeur. Parce-que sur un featuring, tu n’appréhendes pas la chose de la même manière. Par exemple, sur le prochain projet « DMT« , il y a uniquement deux collaborations, Serane et Amor Fati, le reste est totalement solo !
Alors, à quoi devons nous nous attendre pour ce prochain projet « DMT« , et que signifie ce nom ?
DMT ça veut dire « Dans Ma Tête ». Mais c’est aussi un petit jeu de mot par rapport à la drogue, la DMT. C’est une drogue très très puissante qui peut te faire ressentir une sensation de mort imminente. C’est des effets surpuissants ! Je n’en ai jamais pris mais de ce que je sais, les symptômes correspondent beaucoup à ce que j’ai pu vivre. Comme de nombreuses phases d’anxiétés où j’avais vraiment l’impression que j’allais mourir.
J’ai appris à combattre et à suivre ce que j’avais vraiment envie de faire. Alors je fais ce rapprochement et c’est comme si j’étais un peu tous les jours sous DMT, mais sans en prendre. Ça veut aussi dire que ce projet là est plus sombre, plus réfléchi et davantage expérimental au niveau des instrumentales. C’est un peu plus électronique. Pour moi c’est mon meilleur projet jusqu’à présent. J’en suis vraiment fier !
Tu as une approche plutôt sensible dans les paroles de ta musique, tu penses que c’est quelque chose qui peut évoluer ?
C’est vraiment dans ma personnalité, je suis quelqu’un de sensible. Je suis un « emotional boy »! En revanche j’essaie toujours de rechercher quelque chose de différent comme je l’ai dit précédemment, alors ça pourrait se retranscrire automatiquement dans mes paroles au bout d’un certain moment. Je cherche à être plus profond dans ma musique. Vivre nourrit mon écriture, alors elle se développera, c’est certain.
Qu’est-ce que tu penses de la nouvelle génération de rappeurs qui émerge en France ?
J’aime trop ce qui se développe, que ce soit le coté Hyperpop, Dysto … Je suis vraiment fier de tout ça. Rien qu’au Grünt Festival, j’ai pris une claque ! Récemment j’ai beaucoup aimé le projet de Realo, Emotions. Et mon frère, Amor Fati, j’aime énormément tout ce qu’il fait.
Aujourd’hui Southlove ou même Serane sont devenus des proches. Mais à la base, je suis un grand fan de ces personnes. BIG B, thaHomey, c’est aussi devenu évident tout ça ! J’écoute vraiment plus que ça. J’espère qu’il nous reste encore de beaux jours devant nous tous.
Tu as déjà eu l’occasion de faire plusieurs scènes. Alors comment ressens-tu la proximité avec le public ? Est-ce que tu aimes ça ?
Honnêtement mon premier show qui était à Rennes était vraiment chaud ! Mais j’étais tellement concentré que j’étais un peu en pierre avec le public. J’étais trop sérieux. Maintenant ça a changé. D’ailleurs je ne ressens plus rien du tout sur scène, j’oublie tout et je profite. C’est une sensations très particulière, je peux avoir très mal quelque part, une fois sur scène ça aura disparu, le temps de ma performance.
Quel moment de ta carrière te rappelle les meilleurs souvenirs ?
Je dirais que c’est lorsqu’on est parti à la montagne réaliser les morceaux de Fort De Sens. On était tous ensemble avec Alex, Dirtyiceboyz, Yasmine, Rozzy, thaHomey et toute la team. C’était déjà un lieu où je faisais des sons quand j’étais plus jeune. Alors là, on aurait vraiment dit un rêve, c’était incroyable !
« Ce qu’il se passe aujourd’hui c’est déjà un rêve »
Comment tu imagines la suite ? Est-ce tu as certaines attentes ?
J’ai envie de continuer et d’agrandir le truc. J’ai aussi envie de rencontrer davantage de personnes. Ce qu’il se passe aujourd’hui c’est déjà un rêve, alors si je peux continuer à faire ça et réussir à réinvestir l’argent gagné dans de prochains sons, c’est l’essentiel. Le reste c’est superflue et je n’en ai pas grand chose à faire.