« Le roi de l’hiver ». Froid, sincère et apaisé, s’il fallait trouver un tryptique désignant « Hiver à Paris » ce serait celui-ci. Le 4eme album de Dinos était l’événement des sorties musicales le weekend dernier. Performance ?
2018. Le début des affaires pour Dinos qui sort cette année « Imany ». Un premier opus où l’on découvre un artiste percutant à travers sa sensibilité. Confirmant son talent d’écriture dans « Taciturne », le natif de la Courneuve poursuit sa course avec « Stamina » en 2021. Différent des deux premiers albums, et comprenant une réédition ensoleillé, le public découvre un Dinos plus détaché. Sa réception est quant à elle moins élogieuse qu’à l’accoutumée. Après trois mini EP aux sonorités variées, Dinos avait bien besoin d’un long projet tel qu’« Hiver à Paris » pour parler et laisser aller sa musique.
Retour maîtrisé
Dinos ne voulait certainement pas dévoiler un nouveau projet sans en travailler les moindres détails. Aussi, les fans ont pu dans un premier temps profiter d’un teaser orchestral avec « Prélude d’un hiver à Paris« . Une première occurrence hivernale qui se poursuivra tous au long du mois d’octobre avec diverses promotions via ses réseaux et ceux de son manager Oumar Samaké. Le jeudi 3 novembre au soir, l’hiver tomba sur Paris et à Dinos alors de plonger ses auditeurs dans une expérience immersive, chacun découvrant la tracklist en même temps, celle-ci se dévoilant au fur et à mesure de l’écoute.
Le projet tient également sa particularité de son format « double album ». Assez commun, le format choisi se démarque ici par sa recherche de sens. Symbolisant les deux rives de la capitale parisienne séparée par la Seine, les deux CD ont deux ambiances qui leurs sont propres. Tandis que sur la rive droite, l’auditeur observe une succession de featurings hétérogènes (Hamza, Ninho, Laylow, SCH, Akhenaton) et de morceaux clinquants tel que « Ma Baby« , la rive gauche apparaît quant à elle plus frappante dans l’écriture. L’album prend alors parfois des airs de film. Suivant les aventures du Pichichi, l’auditeur est balancé entre deux émotions, alternant entre la féerie et le froid glacial de l’hiver.
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Clipper le track avec Hamza « Chrome Hearts » était alors le point d’orgue d’une organisation minutieuse afin qu’une grande partie de l’auditoire du rap francophone soit balayé par le vent glacial élaboré par Dinos.
Nuance(s)
Nuancé, c’est probablement comme cela que Dinos désire que l’on comprenne la carrière qu’il a réalisé jusqu’à maintenant.
Alors que certains lui reprochent un flow trop prévisible et parfois forcé, dans « Hiver à Paris », Dinos a voulu composer avec de nouvelles sonorités et prendre des risques. Pas forcément dans le flow, car oui, on retrouve de manière assez large ce qui fait la recette Dinos, à savoir une tonalité mélancolique sur lequel on sait le rappeur à l’aise. Toutefois, au-delà de cette zone de confort parfois prévisible, Dinos progresse sur d’autres aspects, notamment le chant. Très présent dans cet album, ce registre lui permet de performer tout en mettant en valeur son côté mélodieux (« Par amour« ).
Sincère, l’écoute d' »Hiver à Paris » fait également ressortir un Dinos mûr, laissant place dans cet album à une réflexion personnelle qu’il a choisi de partager avec son public. Aussi, sur le second track « AMG performance« , Dinos introduit son projet et déclare avoir atteint ses objectifs tout en précisant qu’il n’arrive pas à se tenir tranquille. Plus loin dans le projet il mène une réflexion poussée sur son changement de classe sociale. Lui, le natif de la Courneuve en Seine-Saint-Denis a vaincu le déterminisme social et se retrouve aisni parfois tiraillé entre le quartier et Paris.
« Aujourd’hui, j’suis un peu star, le serveur m’a reconnu
Donc j’lui donne un pourboire pour prouver qu’j’suis pas crevard. » – SimyaciUn sentiment de culpabilité rarement évoqué par les rappeurs que Dinos développe tout au long de cet album, tel un fil rouge. Un signe de maturité pour un artiste qui porte désormais un regard averti sur sa carrière, son parcours, ses proches et son futur.
Nouvelle étape
Car « Hiver à Paris » est un projet qui peut diviser d’un point de vue artistique, posant la question d’un tournant dans la carrière de Dinos et d’une potentielle scission avec ces précédents projets, notamment les deux premier « Imany » et « Taciturne ».
Sur ce nouvel album, Dinos semble avoir intégré certaines remarques, tout en rappelant qu’il écrit pour lui et sa musique. Ne voulant pas devenir « le cliché du rappeur« , le Pichichi s’est remis en question et s’est concentré à tenter d’apporter un oeil objectif sur sa musique.
Dinos, artiste avec une audience grandissante comme en témoigne son prochain Bercy, accepte le fait que sa musique parle au plus grand nombre. Jusqu’à parfois, pour certains, à en perdre sa singularité ? Une interrogation à laquelle Dinos répond ici avec un second CD bien écrit et touchant, dans lequel les thèmes évoqués sont effectivement communs aux précédents albums, mais maîtrisés.
Dinos, pas encore réchauffé.
« J’ai fait Stamina pour être platine, et ça s’est vu
Le disque d’platine est toujours dans l’papier bulle » – Simyaci