Les dernières campagnes de Paco Rabanne et Miu Miu n’ont pas manqué de nous interpeller.
Aujourd’hui, Trente Trois Degrés vous dit tout d’un ère qui aura marqué toute une génération : le Space Age.
Prenons la mini-jupe par exemple, celle qui a tant fait parler au défilé Miu Miu printemps-été 2022. À priori, il s’agit d’un de ces symboles Y2K parmi cette jeunesse qui ne se cache plus d’exprimer son assurance. En réalité, la création de la mini-jupe résulte de ce qu’on peut littéralement appeler le Space Age ou Atomic Age.
Mais qu’en est-il vraiment de ce mouvement où le traditionnel s’évanouit dans les bras du rétro-futurisme ? Jusqu’où son influence s’étend-t-elle ?
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L’apparition
Le Space Age débute à la fin de la Seconde Guerre mondiale, en Californie plus précisément. Les avancées scientifiques et technologiques permettent alors de mener les premières missions dans l’espace. La société renoue avec un mode de vie prospère. Et ce, grâce à la hausse du pouvoir d’achat en partie. En parallèle, la création de la bombe atomique fait régner un climat de dissuasion nucléaire : d’où Atomic Age.
« Il me semble que le peintre moderne ne peut exprimer cette époque, l’avion, la bombe atomique, la radio, dans les formes anciennes de la Renaissance ou de toute autre culture passée. Chaque âge trouve sa propre technique » —Peintre Jackson Pollock (1951)
Ce courant, bien plus qu’une tendance, s’impose comme un mode de vie. Son universalité peut se traduire sous une pluralité de forme d’art et architecture. Le Space Age Design se répercute dans la façon de s’habiller, dans le publicitaire, l’animation et même au cinéma. C’est le cas de 2001 : L’Odyssée de l’espace (1968), Star Trek, le film (1979) ou encore de la série d’animation The Jetsons (1962).
Un courant universel, innovateur et intemporel
Emanuel Ungaro, Thierry Mugler, Issey Miyake : beaucoup se sont approprié cette période pour définir leur propre style. Ainsi, ils ont tâché d’effacer toute trace de pudeur pour faire place à leur avant-garde.
Dans les années 60, la France est sur le devant de la scène avec les lignes Spage Age de Pierre Cardin et Moon Girl d’André Courrèges. Mais leur voisin espagnol – Paco Rabanne – n’a pas manqué à l’appel, précurseur du genre lui aussi.
L’ensemble de leurs créations brise les codes avec l’utilisation de matériaux spécifiques tels que le métal, l’aluminium, le plastique… En résultent des pièces innovantes, complètement atypiques et unisexes pour la plupart d’entre elles.
« Le vêtement que je préfère est celui que j’invente pour une vie qui n’existe pas encore, le monde de demain » – Cardin
Revenons-en à notre mini-jupe, c’est précisément à cette époque qu’elle se démocratise. Mary Quant apparaît alors en tant que sa créatrice. Seulement, certaines élites de la couture – dont Coco Chanel – sont très réticentes face à cette pièce qui méprise toute décence.
Peu importe, des personnalités comme Jacqueline Kennedy n’hésitent pas à s’affranchir de la coutume et prôner la tenue.
Le Space Age est un milieu où l’optimisme, l’espoir et le rêve prédominent dans l’esprit des consommateurs. C’est ainsi que la notion d’émancipation retrouve tout son sens dans une société où, oser, devient le mot d’ordre.
Par ailleurs, le Space Age s’introduit tout autant dans les maisons que les structures publiques. Celui-ci se voit mélangé au kitsch et Googie, et beaucoup de restaurants où magasins revêtent un caractère organique et technologique. Le tout sous des formes abstraites inspirées d’atomes, d’étoiles et souvent de boomerangs.
Tous fascinés par l’ère spatiale, les architectes inscrivent un nouveau genre d’ameublement et d’habitations. En témoigne les maisons Futuro/Venturo du finlandais Matti Suuronen ou le téléviseur Keraclonic conçu par Arthur Bracegirdle (Angleterre). Il en est de même pour l’incontournable système Hi-Fi Vision 2000 de Thilo Oerke (Allemagne) et les fauteuils de l’italien Joe Colombo.
« Dans les années 1940, les tables modernes, les contenants et toutes sortes de choses ont soudainement commencé à fondre, à devenir mous. Qu’est-ce qui a influencé tant de créateurs simultanément ? Je pensais à l’époque que ça pouvait être les tableaux de Salvador Dali, un en particulier, avec la montre fondante »
—Designer Eva Zeisel (1991)
Enfin, le Spage Age impose aussi un exercice de style côté automobile. La Citroen Karin (1980) de Trevor Fiore se dote d’une silhouette pyramidale et d’un esthétique unique. Ce coupé portes papillon possédait tout juste trois places avec le conducteur au centre. Raison pour laquelle, d’ailleurs, il n’est jamais entré en production.
De même, Gandini fait parler de ses modèles dont l’Alfa Romeo Carabo (1968) et la Lancia Sibilo (1978), conceptualisés chez Bertone.
Le 21e siècle, les portes d’un Space Age 2.0 ?
Fondé sur le rétrofuturisme, le Space Age est à l’origine d’un déclin culturel majeur, le regard porté vers l’avenir. La course à l’espace a permis à la société de conquérir un profond sentiment d’ambition et d’imagination.
Depuis, est née chez les humains une obsession de visualiser le futur se disant à quoi ressemblera demain. Mais le temps est passé. Cette époque vit d’un futur fantasmé qui contraste vraisemblablement avec le présent.
Nos jours ont perdu l’optimisme qui régnait, en ont gardé que l’influence. Il est vrai que, ces dernières années la vision futuriste a été remise sur la table. Le défilé “Chanel Ground Control” automne-hiver 2017-2018 ou celui de Louis Vuitton au Musée d’art contemporain de Niterói en sont la preuve. Moins connu, prenez le jeune créateur Dingyun Zhang pour exemple.
Sommes-nous donc aux portes d’un Space Age 2.0 ? On aura sûrement la réponse si Jacquemus organise son prochain défilé dans l’espace. Plus sérieusement, le temps laisse penser que tout est une question de cycle.
En fait, ce qui importe, ce sont toutes ces choses qui se rattachent à ce passé futuriste. Tout comme cette mini-jupe Miu Miu, vous savez.
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