À 22 ans, Luv Resval s’impose comme l’un des rappeurs les plus singuliers et créatifs du hip-hop français. Après une année 2021 marquée par le sortie de son 1er album (Etoile Noire), Luv revient en 2022 avec la suite intitulée “Étoile Noire 2.0 : ZLM”. Qu’as tu à nous dire jeune sith ?
Il poursuit son ascension. Après un premier album de 19 titres en 2021, voici que le projet « Étoile Noire » de Luv Resval se voit agrémenté d’un nouveau disque « ZLM ». 15 titres au programme, pour un rappeur prêt à laisser sa cape de rookie.
2.0!
— 696 jours (@LuvResval6) March 24, 2022
L’Empereur Mephisto
Le rap est traversé par diverses influences génériques. Les jeunes artistes décidant d’y jouer leur carte arrivent rarement sans un artiste référence à l’esprit. Pour le jeune Luv Resval, c’est Alkapote qui a bercé et marqué le début de sa carrière. S’affichant à ses côtés, il a connu avec lui ses premiers succès. En 2017, il sort sa toute première mixtape “Yung Life” avec, en featuring, le bien nommé Alka.
Le duo sortira même un EP commun en 2018. Célébrant Noël à leur manière, celui-ci s’intitulera “Mariah”. Signé au sein du label AWA de DJ Kore, le jeune rookie développe son identité et se fait un nom. Comment ? Grâce à ses nombreuses références, et notamment celle au personnage de la licence Marvel, Mephisto. Ce dernier, incarnation du diable, cherche à s’emparer de l’âme des mortels. Luv, quant à lui, cherche à accrocher l’oreille de tout auditeur curieux. Chose faite avec son premier album “Etoile Noire”, tout droit sorti des flammes.
Trop peu évoqué, “Etoile Noire” fût l’un des projets marquants de l’année précédente dans l’écosystème Rap FR. Le grand public a pu découvrir un artiste à la plume fine, soignant ses textes à grands coups de rimes multisyllabiques. Fantaisiste, le rappeur nous emmenait dans un conte à base de crapauds, châteaux et autres princesses. Tentateur, Luv décide alors d’y confronter le bien et le mal, à travers une mise en avant du désir de puissance.
“Beaucoup d’ce-for comme les Borgia” – Les Borgia
Maître référencier, le rappeur ne débute pas “Etoile Noire” avec un son intitulé “Les Borgia” par hasard. Référence équivoque à la puissante famille espagnole séjournant à Florence au cours de la Renaissance, Resval aspire à dominer. Dans un souci d’unité, Luv Resval décide ainsi d’ouvrir “Etoile Noire 2.0 : ZLM” par une autre figure majeure de la ville de Florence, qui n’est autre que le génie Léonard de Vinci. Asseyons-nous et apprécions l’écoute du tableau dépeint par celui qui, humblement, s’est attribué le titre “Luv de Vinci”.
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ZLM : balade hivernale lancinante
ZLM sera différent. Dès le premier morceau, l’auditeur comprend aisément que Luv désire lier les deux disques sans toutefois réaliser une copie conforme d’”Etoile Noire”. Première différence notable, l’entrée dans le projet est bien moins épique. Plus calme, moins fougueux, le rappeur nous partage son humeur glaçante. Attention, pour ses fans pas de panique, la puissance qui émane de son flow est toujours bien présente. Pas de place pour l’ennui dans cette balade made in Luv Resval.
“On t’emmène en balade sur des mélos comme le chanteur de Nirvana.” (Nostalgie).
À l’écoute du morceau « Balade nocturne, part II”, l’ambition artistique de ce nouveau projet ressort clairement. Toujours désireux de partager avec ses fans un voyage sensitif, Luv cette fois-ci prend le temps. Ce dernier joue d’ailleurs un rôle à part entière et Luv Resval excelle dans les changements de rythme. Ainsi, le morceau “Balade nocturne, part II”, est magnifié grâce à ses placements qui, à 45 secondes, se stoppent pour initier une danse lancinante suivie d’un piano mettant en valeur le couplet qui suit. Des strophes qui d’ailleurs semblent parfois évoluer en autonomie complète. Comme si Luv Resval perdait le contrôle et se laissait dominer par son flow comme c’est le cas sur la track “Triangle des Bermudes” où Luv ne respire plus entre chaque lines.
Les références dispensées par le rappeur dans ses sons demeurent toujours aussi nombreuses. Rien que dans un demi-couplet sur la track “Nostalgie”, Luv Resval assène l’auditeur de sa bibliographie pop-culture :
“Le visage de Médusa, j’découpe avec l’épée d’Aragon / Et mon (?) te laisse immobile, dans l’ombre comme un shinobi / Le flow digital comme Bender, toujours en soirée, j’m’en rappelle, mais j’suis dans la forêt comme le Slender / On t’emmène en balade sur des mélos comme le chanteur de Nirvana / La Tony Montana, cette follasse voulait tous les diamants à Diana.”
Par ailleurs, les thèmes évoqués dans ZLM reprennent pour la plupart ceux des “artistes maudits”. En effet, comment ne pas penser à l’écoute de ce projet à ces poètes (Verlaine, Baudelaire, Rimbaud) ou peintres (Van Gogh) ayant été marqués par le destin.
Les plus célèbres de ces artistes maudits vivaient à la fin du XIXe siècle, époque culminante du romantisme. Un thème très largement mis en avant dans les textes de Luv Resval. Artistes au destin tragique, une malédiction semblant s’être abattue sur eux. Et le jeune rappeur ne manque pas de reprendre ce sujet, notamment à travers la belle allégorie d’une relation perdue au milieu de son “Triangle des bermudes”.
Pour quelle réussite ?
La question est légitime. Ça y est, Luv Resval a atteint un certain stade de maturité. Son premier album a été reçu positivement de manière quasi unanime.
Le casting de featuring est plutôt réussi. Preuve de la richesse artistique de Luv , et le respect grandissant que lui accorde certains rappeurs confirmés. Le premier feat avec Koba, que les fans du rappeur d’Evry apprécieront probablement, est inégal. Pourtant les deux univers des MC auraient pu réellement matcher. Le second featuring lui est une réussite. L’alchimie avec Dinos est évidente pour celui que l’on sait hors concours quand il s’agit de glacer un studio. Mr Punchlinovic met son phrasé pointu au service du jeune MC de 22 ans, pour un morceau qui comptera à coup sûr dans la discographie de Luv. Enfin pour conclure son triptyque, Luv pose aux côtés de la douce voix d’Holly Evans. Joli morceau de sucre tombé dans nos oreilles, et probablement le meilleur morceau du projet.
“On revient pour faire la guerre et on danse comme à Wallachia” – Wallachia
“Etoile Noire 2.0 : ZLM”, est assurément différent du premier disque “Etoile Noire” présenté au public. Certains auront probablement besoin d’un temps de digestion plus conséquent pour apprécier des mélodies nouvelles dans la discographie de Luv. D’autres regretteront évidemment certaines exclus teasées et qui ne sont pas présentes (“Beethoven” et “Planète Kaïo” entre autres). Mais Luv sait donner à manger à son public et livre une nouvelle fois un projet abouti. L’unité recherchée est là, le banger “Athéna” saura ravir une large audience et le phrasé mélodieux de Luv Resval se démarque toujours autant.
À l’heure du retour de Nessbeal, “le roi sans couronne”, Luv Resval, jeune prince ambitieux, semble prêt lui aussi à prendre sa part du château.
Etoile Noire 2.0 : ZLM est disponible sur toutes les plateformes de streaming.
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